Les raisons qui peuvent pousser un collaborateur à amener au bureau un petit sac à dos virtuel avec ses problèmes personnels sont nombreuses. Il y a, bien sûr, le stress de la vie quotidienne avec sa charge mentale (courses, enfants, obligations familiales…). Il y a aussi les vies amoureuses qui, parfois, s’entrechoquent. Pas facile d’être concentré quand la personne qu’on aime est dans les reproches personnels ou après une rupture. Il y a encore le pouvoir d’achat en berne dans notre pays qui amène certains Belges qui travaillent au bord de la pauvreté. Il y a aussi les informations anxiogènes qui se succèdent sur nos écrans.
Nous aimerions tous pouvoir déposer, en entrant sur notre lieu de travail, ces petits (ou parfois gros) sacs à dos virtuels. Mais ce n’est pas possible. Nous devons faire « avec ». Tout comme l’entreprise pour qui, c’est un enjeu majeur.
« Un de mes collaborateurs a perdu une bonne quinzaine de kilos en un mois début d’année. J’ai d’abord pensé qu’il avait dû se mettre au sport intensivement. Mais, en parlant avec ses collègues, j’ai appris qu’il venait d’être quitté par sa compagne pour un de leurs amis. Un cliché aussi vieux qu’insupportable. Il était en grande souffrance. En discutant avec lui, il m’a d’ailleurs avoué être incapable de manger normalement depuis des semaines. J’étais passé totalement à côté de ce qu’il vivait » confie Céline, manager dans une agence digitale.
Quand on est manager ou RH, le quotidien parfois très chargé ne permet pas toujours de « voir » que certains de nos collaborateurs passent une période plus compliquée. C’est d’autant plus vrai que les difficultés ne s’expriment pas de la même manière chez tout le monde.
Et pourtant, certains symptômes peuvent nous alarmer.
Un des tous premiers est le changement physique. Une perte ou un gain excessif de poids, par exemple. Une négligence vestimentaire ou corporelle qui peut laisser penser que le collaborateur se laisse un peu aller.
Autre alerte ? Des erreurs qui se font dans le travail et qui ne se faisaient pas auparavant : des oublis d’agenda, des mails envoyés négligemment, des rapports incomplets…
Troisième alerte : les absences. Régulières et répétées, elles traduisent un mal-être profond (nous vous renvoyons vers notre précédente newsletter consacrée à l’absentéisme).
Enfin, ce qui peut alerter également, c’est un changement de comportement. S’isoler le midi, devenir extraverti alors que l’on ne l’était pas, arriver trop tôt au travail (ou être systématiquement en retard), faire des heures supplémentaires excessives et injustifiées.
La frontière entre la nécessité de savoir ce qui se passe et l’intrusion dans une vie privée est parfois ténue. Il n’est pas facile non plus de trouver les bons mots ou le bon moment.
Voici quelques éléments à prendre en compte :
Lors de l’entretien, la conversation ne doit jamais être intrusive. Il est, par exemple, plus simple pour quelqu’un d’entendre :
Le maître-mot est donc l’empathie. C’est-à-dire, non seulement la capacité de se mettre à la place de l’autre, mais également de l’aider. Le tout, sans aucun jugement.
Il est également essentiel de se rappeler que le RH ou la manager n’est pas un ami ou un psy. L’empathie et l’écoute se font dans le strict cadre du travail, afin que celui-ci ne soit pas impacté. Il est donc important de rappeler au collaborateur que la discussion se fait pour trouver des solutions dans l’entreprise, mais que pour ce qui est d’ordre extra-professionnel, vous n’êtes pas le bon interlocuteur. Mettre une limite permet également de bien faire comprendre à certains collaborateurs qui seraient tentés de voir soudainement en vous un proche duquel se rapprocher, que vous ne l’êtes pas.
On rappellera, enfin, que l’empathie, ce n’est pas accaparer les problèmes de l’autre. Un manager ne doit pas se projeter à la place de son collaborateur et décider pour lui en amenant des solutions clef en main.
Une bonne question à poser à un collaborateur en difficulté est : « En quoi puis-je t’être utile ? ».
Il pourra alors peut-être exprimer ce qu’il attend de l’entreprise et amener des propositions qui lui permettront de mieux vivre au travail sa situation personnelle.
En tant que manager ou responsable RH, vous avez la possibilité de mettre en place certaines mesures :
Toutes ces mesures doivent être prises dans un état d’exception et de transition. Elles sont mises en place le temps que le collaborateur aille mieux et puisse, de son côté, solutionner ce qui doit l’être. Ce contrat doit être clair entre l’entreprise et le collaborateur.
Montrer à la personne en détresse qu’elle n’est pas seule permet aussi de démontrer à l’ensemble des collaborateurs que l’entreprise n’est pas qu’un lieu de performance et de chiffres. C’est aussi l’occasion pour les managers et les ressources humaines de travailler sur un autre aspect essentiel du management : la prévention. On le sait, les risques d’absences ne sont pas uniquement liés à des problèmes de santé. Accompagner des collaborateurs en souffrance personnelle est aussi une bonne manière de prévenir de plus longues absences.